Je suis shérif. Vous entendez ? Je suis shérif !! Bientôt, je serais Ranger, et plus personne ne pourra me marcher dessus ! C’est ce qui s’appelle une revanche sur la vie, non ? Je suis tellement content que la première chose que je fais en rentrant le jour de ma promotion, c’est le fêter avec ma petite dernière avec un petit tour d’avion sur mes épaules, et ce, sans même enlever mon uniforme… Laissez-moi profiter un peu… !
Mais bien sûr, ça veut aussi dire redoubler d’efforts pour être parfait. Hors de question que je me laisse devancer par mes collègues en lice pour la prochaine (et ultime) promotion !
Mais malgré tout, je ne pense pas qu’à ça. En effet, Sélana commence à ramener des amis à la maison… et je suis sur mes gardes. Attention les gosses, vous faites du mal à mon bébé et ça va barder… !
Bon, la petite Sonia n’est pas méchante. Et puis, elle aime regarder le ciel, donc je ne peux pas vraiment la détester, on a des goûts en commun.
Mais elle partage aussi l’amour de l’échelle horizontale de Sélana.
« Eh Sonia ! T’arrives à faire ça ?
— T’es folle, j’ai pas envie de me casser la nuque ! »
Même si elle est plus raisonnable que ma fille… Enfin, pas pour tout. Je l’ai surprise dans la salle de bain après une séance de jeu extérieur avec Lana en train de repeindre le sol à sa manière. Je l’ai gentiment réprimandée, et elle m’a regardé avec un grand sourire.
« Oh, pardon M. Berry, je le ferais plus… »
Mouais… J’espère qu’elle est sérieuse ! J’aime pas ce sourire taquin ! On dirait Aya quand elle s’apprête à faire une farce…
« Bon… Vous n’avez pas des devoirs à faire toutes les deux plutôt ?
— Si ! J’y vais ! »
Heureusement qu’elles m’écoutent des fois quand même…
J’ai l’impression de ne pas la voir grandir. Elle fait déjà ses devoirs (presque) toute seule, et quand je l’aperçois en train de jouer avec Sonia, je me dis qu’elle est bien en phase de devenir une vraie jeune fille. Ça me rassure presque de m’occuper d’Albae. Elle est petite, elle a encore besoin de nous, même si elle est elle-même assez indépendante ! J’aime bien la coucher le soir quand je rentre du travail. Ça me permet de passer un moment privilégié avec elle.
Étrangement, les filles ne rechignent pas à dormir dans la même chambre. Albae ne se réveille même pas lorsque Lana se réveille en sursaut à cause du monstre sous son lit (d’après elle).
Ça me fait plaisir, mais je ne les trouve pas très proches pour l’instant. J’espère que ça va changer…
Mais mes craintes se sont révélées infondées. Lors de l’anniversaire de leur mère, que nous avons fêté en tout petit comité, les filles ne se sont pas lâchées d’une semelle.
Et le lendemain, pour bien commencer mon week-end, alors que je me prépare tranquillement dans la salle de bain, Julie m’appelle. En pleurs.
« Woh, Julie, respire, calme-toi, qu’est-ce qu’il y a ?
— C-C’est maman… Elle est… »
J’ai l’impression d’avoir avalé une pierre. Déjà… ?
« Qu-Quand ça… ?
— C-Cette nuit… P-Papa l’a d-découverte en s-se réveillant c-ce matin…
— Je suis vraiment désolé… Je peux passer, si tu veux.
— M-Merci Aurèle… Mais ça va aller, on va… »
Elle renifle.
« On va rester tous les deux, pour l’instant.
— D’accord. Je comprends. Embrasse bien fort ton père pour moi. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, on est là, Aya et moi, ok ?
— Oui, merci. »
Elle raccroche, et j’éloigne le téléphone de mon oreille, dépité. Je savais que ça allait arriver un jour, mais Julie n’est même pas adulte…
Je réalise soudainement que c’est peut-être ce qu’il va se passer avec Albae. Je ne suis pas éternel, et Aya non plus… Heureusement, elle a Sélana. Bon sang, je n’ai pas envie de penser à ça, mais c’est inévitable…
Je parviens à enterrer plus ou moins ma peine dans l’après-midi lorsque Sélana rentre. Mais elle n’est pas seule. Elle est avec Sonia, comme souvent, et un jeune garçon que je n’ai jamais vu. Mais on dirait qu’il a un air de famille avec Sonia… Son frère ?
Mon mode « père protecteur » revient au galop. Sonia a passé presque tous les tests… Alors il n’y a pas de raison qu’il n’y passe pas non plus ! Sauf qu’il commence très bien puisque c’est lui qui propose qu’ils commencent par faire leurs devoirs avant de jouer. Je me décide alors à me joindre à eux pour prendre la température.
« Bonjour ma chérie, bonjour Sonia, et bonjour… A qui ai-je l’honneur ? »
Je fais le tour de la table et le salue. Eh oui, moi aussi je dois être poli… Méfiant, mais poli.
« Ah, bonjour monsieur Berry ! Je suis le frère jumeau de Sonia, Eliott. Enchanté. »
Oh, quel gamin bien élevé… Sonia n’est pas spécialement mal élevée mais disons que ça se voit mieux chez lui.
« Papa, Eliott est le meilleur élève de la classe, alors il m’aide beaucoup !
— C’est vrai ? Eh bien merci de ton investissement, jeune homme.
— Tout le plaisir est pour moi, monsieur Berry. »
Tout le… Pardon ? Je décide de faire comme si j’avais rien entendu. Mais je t’ai à l’œil, gamin…
Je les laisse tranquille pour l’instant et m’attèle à la préparation du repas de ce soir. Je garde mes oreilles ouvertes, cependant.
« Eh, Eliott, j’ai appris un morceau pour la fête de l’école, je te le fais écouter ?
— D’accord ! C’est vrai que t’es douée, j’aime bien t’écouter jouer et chanter ! »
Arrête de draguer ma fille, l’intello…
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