Ça y est, notre petit Lotus est né. L’accouchement s’est déroulé sans encombre, et notre fils est en pleine santé.
Oui, je dis « notre fils ». Peu importe qui est son géniteur, c’est de toute façon Leslie qui va l’élever à mes côtés, quelle que soit ma relation avec Tray. Et en plus, je crois que je ne l’ai jamais vu aussi heureux que depuis qu’il peut prendre Lotus dans ses bras.
Il n’y a que les parents de Leslie qui ne sont pas venus le rencontrer pour l’instant, dans notre entourage proche. Ils nous ont félicités par téléphone, mais ils sont visiblement trop occupés pour faire la route… Leslie me dit que c’est parce que son père fait beaucoup de voyages d’affaire en ce moment, et sa mère l’accompagne à chaque fois. D’accord, mais bon… ils auraient pu passer, même en coup de vent, je suis sûre.
Tray, lui, a quand même fini par oser me demander à le voir. Et j’ai dis oui. Je n’y ai pas vu d’inconvénient. Après tout, il y a une infime chance pour que ça soit son fils…
« Bonjour Lotus… »
Il me félicite sur le choix du prénom qu’il trouve adorable, et je l’en remercie. Il le berce un moment et finit par murmurer :
« Je veux pas te faire peur, mais il me ressemble comme deux gouttes d’eau. »
Je laisse échapper un petit rire. Je sais qu’il plaisante, ce genre de choses ne se voit pas sur un nourrisson de six mois. Mais en même temps, je sens mon cœur se serrer. Est-ce que je serais si horrifiée que ça ne soit pas le fils de Leslie ? Probablement pas. J’aime aussi Tray de tout mon cœur, alors avoir un enfant avec lui n’est pas une idée qui me rebute le moins du monde. Même si mentir à Leslie, par contre, n’est absolument pas agréable.
Il le repose et s’approche de moi avant de m’embrasser tendrement la joue.
« Merci de m’avoir laissé le voir. »
Je lui souris tristement. Il sait qu’il ne pourra pas le voir beaucoup, surtout lorsqu’il va commencer à parler. Il me serait difficile de trouver une explication convenable si Lotus se mettait à mentionner Tray à Leslie…
Il observe le petit encore quelques instants, puis, ne pouvant pas rester, m’embrasse une dernière fois avant de descendre et quitter la maison.
•
Lotus est un vrai petit ange. J’aurais pensé que plus le temps passerait, plus il aurait fait de bêtises, en même temps qu’il aurait gagné la faculté de se déplacer tout seul, mais non. La plupart du temps, il joue tranquillement sous nos yeux attentifs.
Quand il veut quelque chose, il ne fait pas de caprice, il se contente de nous regarder avec ses grands yeux jusqu’à ce qu’on comprenne.
Il est tellement facile que je me sens pousser des ailes, et bien vite je demande à Leslie s’il serait partant pour en avoir un deuxième. Lotus n’a même pas deux ans, mais ça me semble tout à fait faisable de m’occuper d’un autre enfant en même temps que lui. Leslie ne voit bien sûr pas d’inconvénient, et seulement quelques mois après cette conversation, je suis à nouveau enceinte. Et cette fois-ci, j’ai fais en sorte qu’aucun doute ne soit possible : c’est bien celui de Leslie.
Il faut cependant que je sois honnête avec moi-même… Même si le fait que Lotus soit très sage m’a aidée à me décider, la raison pour laquelle j’ai voulu un autre enfant si vite est en grande partie parce que je me sens coupable vis-à-vis de Leslie. Coupable de le tromper, coupable de ne pas savoir s’il est vraiment le père de Lotus, coupable de lui mentir… Je suis vraiment une épouse médiocre.
Mais… Dès que je suis dans les bras de Tray, j’oublie tout ça. On se voit environ une fois toutes les deux semaines, parfois un peu plus si les conditions sont réunies, et c’est tellement une torture d’attendre chaque rencontre que tous mes doutes s’envolent quand je le vois enfin.
De l’autre côté, sa relation avec Rose décline. Et ce n’est pas à cause de moi, il me l’a assuré. Non, c’est juste qu’ils perdent tous les deux patience en ne parvenant pas à avoir l’enfant qu’ils veulent tant, et ils se disputent beaucoup plus à cause de ça. Il m’a avoué du bout des lèvres qu’ils allaient consulter, pour voir si le souci n’est pas physiologique.
Si Tray apprend qu’il est stérile, ça lèvera complètement le doute pour Lotus, mais je ne sais pas si c’est ce que j’ai envie d’apprendre. Enfin, dans tous les cas, ce n’est pas moi que ça concerne. J’espère sincèrement qu’il n’y a pas de soucis, et qu’ils sont juste tous les deux beaucoup trop anxieux.
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J’ai eu mon premier rendez-vous chez l’obstétricien un peu tard, et je pense que je n’aurais pas dû attendre autant… J’attends des jumeaux. Des jumeaux ! Il a même pu me dire qu’il y aurait une fille et un garçon. C’était pas du tout prévu… M’occuper d’un bébé en plus de Lotus d’accord, mais deux ?
Leslie a été extatique, mais quand il a vu ma tête, il s’est empressé de se calmer et m’a rassurée : il allait prendre un congé parental aussi long que le lui permettait sa hiérarchie pour m’aider. Il est vraiment adorable…
Je dois bien avouer que depuis que je sais que j’attends non pas un, mais deux bébés, ça explique pas mal de choses : je suis beaucoup plus facilement fatiguée que pendant ma première grossesse, et porter Lotus est devenu compliqué. Malgré tout, je le fais quand même, parce que hors de question de ne pas prendre mon bout de chou dans les bras.
Comment résister, quand il me regarde avec ses grands yeux ?
Ils sont bien bleus, comme ceux de mon père… Ça me rappelle constamment qu’il ne le connait pas, et je ne sais pas si j’ai réellement envie qu’il le connaisse… Maman me rappelle de temps en temps que papa a changé, qu’il regrette ce qu’il s’est passé, tout ça. C’est facile de dire ça. Mais il faut bien admettre que je ne lui ai pas laissé beaucoup de chance de s’excuser (aucune, à vrai dire), et… comme les yeux de mon fils me rappellent les siens, c’est plus difficile de faire l’autruche : je pense souvent à lui en ce moment, et il me manque, que je le veuille ou non.
Leslie me fait des blagues, en me disant qu’on peut le recevoir et que s’il me manque de respect il le met dehors à coups de pied au derrière, peu importe qu’il soit un haut gradé militaire, et j’avoue que ça me fait sourire comme image.
Peut-être qu’on fera ça, alors… A la naissance des petits, pour que j’ai le temps de me faire à l’idée.
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