Chapitre 127
- ongatheringsims
- 22 févr. 2022
- 6 min de lecture
Le lendemain de notre discussion, je m’attèle à lui faire un joli gâteau d’anniversaire. Bon, j’y gagne aussi, puisque j’adore les gâteaux et les pâtisseries en tout genre… mais j’ai aussi envie de lui faire plaisir. Et comme nous sommes samedi, aucun de nous n’a à aller à l’école ! J’ai aussi demandé à Tony si je pouvais avoir le week-end de libre pour pouvoir le passer avec mon petit frère pour l’occasion, et il a accepté sans soucis. Mine de rien, ce n’est pas un patron tyrannique… !
Regardez ça ! Je crois que papa aurait été fier de moi.

J’avais entendu du mouvement dans la chambre de Chiyuki, alors c’est sans surprise que je le vois sortir immédiatement après. J’entreprends alors de lui chanter « Joyeux anniversaire », et ça a l’air de le faire bien rire. Je chante si faux que ça ?
Il se penche ensuite et souffle les bougies de toutes ses forces.

Mon petit frère a quatorze ans maintenant… J’ai du mal à y croire. Mais bon, il va bien falloir que je m’y habitue ! Il ne va pas rester un enfant toute sa vie !
« Eh, Yuki. Notre discussion d’hier soir m’y a fait penser… Est-ce que tu veux… aller à Oasis Springs ? Voir papa et maman ? Et peut-être Katia, si elle est là.
— Oh. On n’est plus allés les voir depuis l’enterrement…
— Oui, je sais. Mais je me dis que ça peut peut-être nous faire du bien, à tous les deux, d’aller leur parler.
— Tu as sans doute raison. »

Je lui souris avant d’engloutir ma part de gâteau. Eh bah il est pas mauvais, en plus d’être beau !
•
Nous nous préparons rapidement, et bientôt nous voilà dans le train pour Oasis Springs. J’appréhende un peu de me retrouver devant la tombe de papa et maman. J’étais sincère que j’ai dis que ça pouvait nous aider, mais à mon avis ça ne va pas être une partie de plaisir non plus…
Mon impression se confirme lorsque nous passons la grille du cimetière. Je sens ma gorge se serrer, mais Yuki, lui, est déjà en larmes. Il se précipite devant la tombe de nos parents, et je le suis, à petits pas.

Ça me rappelle la dernière fois qu’on est venus ici, avec papa. Ce n’était pas un contexte très joyeux non plus, puisque c’était juste après la mort de tatie Aegis.
•
« Pourquoi elle est pas enterrée ici, tatie Syrah ? demande Chiyuki avec un air triste.
— Parce qu’avant de mourir, elle a dit qu’elle voulait être inhumée dans le cimetière de Willow Creek, avec Max. Du coup, c’est là qu’ils sont, maintenant, tous les deux, répond gentiment papa en regardant les tombes de ses parents. »

Après nous être recueillis sur la tombe de tatie Aegis, papa nous a emmenés devant celles de nos grands-parents, que nous n’avons pas connus.
« Votre grand-mère était quelqu’un d’extrêmement doux, et elle savait toujours quoi dire quand les gens étaient tristes. C’est un talent que je lui envie beaucoup, surtout en ce moment. »

Je regarde les deux tombes et sens la colère monter légèrement.
« On est tous condamnés à souffrir de la perte des gens qu’on aime. J’aime pas ça. Tatie Aegis, tatie Syrah et tonton Max étaient même pas si âgés que ça… »

« Ca va sonner un peu cliché ce que je vais dire, mais la mort fait partie de la vie Kasai. Tu ne peux rien y changer. Elle est là, et elle survient souvent de manière injuste, mais elle reste inéluctable.
— Hm. C’est aussi un truc comme ça qu’aurait répondu mamie ? demandé-je avec un léger sourire.
— Peut-être, me répond-il en riant. Finalement, je lui ressemble sans doute un peu. »
•
Pendant un moment, Chiyuki ne bouge pas, se contentant de pleurer silencieusement. Ça me fait mal au cœur de le voir ainsi, mais je pense qu’il en avait besoin. Et moi aussi.
Il décide de s’asseoir, me laissant la place de faire de même si j’ai envie. Pour l’instant, je reste debout.
« J’espère que vous êtes bien ici au moins, finit par murmurer Yuki. Avec presque toute la famille. Kasai et moi, on se débrouille, même si c’est pas facile, alors il faut pas vous inquiéter. »

Je souris en entendant ça. Il rassure même les morts.
Je lis distraitement les épitaphes sur les tombes en attendant de voir si Yuki enchaîne, mais il ne dit plus rien. Je me racle alors la gorge et prends la parole à mon tour :
« Papa, tu m’as dis de protéger Yuki, alors j’essaie d’honorer ma promesse du mieux que je peux. Mais il est grand maintenant, et j’ai confiance en lui pour se prendre en main, et peut-être vieller sur moi un peu aussi. »

Je lui serre gentiment l’épaule et il place sa main sur la mienne, m’encourageant.
« Je ne fais probablement pas ça comme tu l’aurais voulu, mais vous n’êtes plus là, alors… il faut bien qu’on se débrouille. »
Chiyuki lâche ma main et, après un dernier reniflement, se relève. Il se tourne vers moi et me sourit tristement.
« Merci de m’avoir emmené ici. »
Sans répondre par des mots, je le serre contre moi, où il se remet à sangloter. Je verse quelques larmes aussi, mais je me contente surtout de lui caresser les cheveux sans le lâcher. J’ai l’impression que c’est de nouveau un tout petit enfant dans mes bras. Je sais qu’il faut que j’arrête de le voir comme tel, mais là, c’est flagrant.
•
Lorsque Chiyuki a pu sécher ses larmes, je lui ai proposé d’aller voir si Katia était chez elle, ce qu’il a accepté. J’ai insisté en disant que s’il voulait rentrer on pouvait, mais il m’a dit que c’était bon, et qu’il voulait la voir. C’est ainsi que je me retrouve à toquer à sa grande porte.

Elle est toujours dans sa maison d’enfance, et je ne sais pas si elle a prévu de déménager, mais au moins elle n’a pas été difficile à trouver. La porte s’ouvre et dévoile Katia, qui n’a pas changé d’un pouce.
« Kasai ! Chiyuki ! »

Au moins, elle a l’air heureux de nous voir.
Elle nous fait entrer et nous emmène dans le salon, où on s’assoit pour discuter.
« Qu’est-ce qui vous amène ici ? demande-t-elle, curieuse. »
C’est vrai qu’on n’a absolument pas prévenu. J’aurais peut-être dû lui envoyer un sms…

« On est venu se recueillir sur la tombe de papa et maman… alors on s’est dit qu’on allait aussi passer te voir. »
Elle perd un peu son sourire et hoche la tête.
« Ah, oui, c’était idiot comme question…
— Non, non, pas du tout. »
Elle se mord un instant la lèvre, comme si elle hésitait, puis enchaîne :
« Vous savez, quand vous avez déménagé subitement à San Myshuno, on s’est beaucoup inquiétés, Roy, Eyleen et moi. On a eu peur qu’il se soit encore passé quelque chose de grave. »
Je ressens un élan de culpabilité. C’est ma faute s’ils se sont fait du souci…
« On… On croulait sous les dettes à cause de ma mauvaise gestion de l’héritage, alors j’ai rapidement dû vendre la maison pour éponger tout ça, et il nous a ensuite fallu un toit rapidement.
— Oh… Vous… Vous auriez pu aller chez Roy et Eyleen, ou même ici. Vous êtes notre famille, on ne vous aurait jamais fermé la porte au nez.
— Je sais… Mais vous commenciez à peine la vie active tous les deux, j’avais vraiment pas envie de nous imposer à vous. Ne t’inquiète pas, on s’en sort maintenant, nous n’avons plus de soucis d’argent, j’ai trouvé du travail en ville. »
Elle retrouve un peu le sourire en entendant ça, et ça me rassure.

« C’est donc pour ça que vous n’êtes pas restés plus de deux mois chez Roy après la mort de vos parents… »
Je hoche la tête en baissant les yeux. Je me rappelle encore de ce jour-là, où le commissaire Richard est venu nous chercher, et où j’ai voulu l’envoyer balader, tellement la perspective que mes parents n’étaient soudainement plus là me paraissaient complètement invraisemblable. On a passé des heures au commissariat avec une assistante sociale. Les plus longues heures de ma vie je crois. Chiyuki n’arrêtait pas de pleurer dans mes bras, et je n’étais pas dans un meilleur état, je dois bien l’avouer. Le commissaire nous a ensuite emmenés chez Roy et Eyleen, notre famille la plus proche.

J’entends encore la voix tremblante de Roy discutant avec le commissaire alors que j’étais à moitié déconnecté de la réalité, sur le canapé, avec Yuki presque évanoui de chagrin sur mes genoux. Je me rappelle avoir vaguement entendu le commissaire expliquer que si Roy acceptait de nous accueillir, ça voulait dire s’occuper de nous jusqu’à notre majorité à chacun. Le silence a été pesant, juste après cette phrase. Malgré mon cerveau fonctionnant au ralenti à ce moment-là, j’ai bien compris que Roy n’avait absolument pas pour projet de s’occuper d’enfants, famille ou pas, dans l’immédiat. Sa sœur était déjà presque adulte, elle ne comptait pas vraiment.
« Vous avez prévu de passer à Willow Creek après ? demande Katia, m’interrompant dans mes pensées. Je sais que ça leur ferait plaisir de vous voir. »

« Mmh… Malheureusement, même si nous n’avons plus vraiment de soucis d’argent, on ne roule pas sur l’or non plus, alors je n’ai pas les moyens de nous emmener aussi à Willow Creek ce week-end. Mais tu as raison, je vais au moins leur envoyer un message pour les rassurer et leur dire qu’on va bien. »
Je termine ma phrase en lui faisant un sourire, et elle hoche la tête, l’air satisfait. C’est vrai que ça met du baume au cœur de voir qu’on a de la famille prête à nous aider, mais maintenant que j’ai trouvé une solution pour nous, je n’ai pas envie de dépendre à nouveau de quelqu’un d’autre. Surtout que… je ne vais pas pouvoir m’extraire des griffes de Tony tout de suite…
• BONUS •

Opmerkingen